« Tu as atteint un sommet de médiocrité ! »
Quoi de mieux qu’emprunter une réplique d’Al Pacino, alias Aldo Gucci, à l’attention de son raté de fils Paolo, pour résumer mon sentiment suite au visionnage de ce film?
En trois mots ? Fade, pathétique, grotesque. So, let’s have a look !
Le démarrage de House of Gucci laissait pourtant rêveur. Adam Driver virevolte, léger et enthousiaste, sur sa bicyclette – il s’arrête – pose le pied à terre – retire ses pinces-pantalon – on l’interpelle – il se redresse – le ralenti observé annonce la suite – on devine l’issue fatale. Boum badaboum ! Amorce réussie. Retour en arrière. Le film peut démarrer… maiiiiiis vlan, v’la l’mur.
Alors, c’est quoi le pitch ? Le film revient sur l’assassinat de Maurizio Gucci, petit-fils et héritier de Guccio Gucci, le 27 mars 1995. Sa future ex-femme, Patrizia Reggiani, a commandité son meurtre afin de toucher la part d’héritage qu’elle estimait devoir lui revenir, avant que Maurizio se remarie avec Paola Franchi.
Du coup, où est-ce que ça patine ? Car tout semblait bel et bien réuni : de l’histoire vraie au casting, du réalisateur émérite à l’équipe chevronnée ; un drame torché au papier de soie, en somme. Cependant, l’ensemble est inégal et les griefs se succèdent. Côté réalisation, la gestion du rythme est catastrophique et fait ressentir chaque minute des 2h37. Vous suerez autant qu’un goret sur le tournebroche. Le film donne ainsi le sentiment de se dérouler en deux parties, à travers une dichotomie assez franche : une première partie plate et navrante, faussement candide, faussement naïve durant la première heure quarante. Les scènes donnent le désagréable sentiment d’être accolées les unes aux autres sans connexion, juste une succession de plans sur-usant d’ellipses. Aucun sentiment ne naîtra pour aucun des personnages, ni positif, ni négatif. L’encéphalogramme demeurera désespérément plat. La pseudo étincelle se produira à plus de la moitié du film après avoir lâché trois soupirs et suffisamment papillonné des yeux pour les garder ouverts. Les situations (et non les personnages) gagneront en intérêt mais pourtant, quelque chose clochera toujours : ah oui, l’enchaînement des scènes, car le grief principal persistera.
Le choix des musiques quant à lui, laisse dubitatif, car les morceaux ne magnifient pas les scènes ; ils sont au mieux une jolie carte postale des années 80. A l’image des scènes, ils se contentent de défiler et prouvent au mieux la culture musicale de l’équipe chargée de la BO. Que dire de la VF? Le doublage est à saigner des oreilles. L’accent italien est surjoué et contribue à rendre les échanges pompeux et ridicules. C’était pourtant le cliché à éviter… Quant à la VO? C’est du même acabit : on tutoie clairement le grotesque. Une suggestion ? Mmmmmmh….. Et pourquoi pas une version avec acteurs italophones histoire de gagner en authenticité ??? Sérieusement les gars, y’en n’a pas un qui y a pensé lors d’une réunion de chantier ?! Côté personnages, il faut de tout pour faire un monde :
- Maurizio est salement bâclé alors même qu’Adam Driver semblait tout indiqué pour le rôle. De l’étudiant idéaliste au flambeur déconnecté de la réalité, de l’amoureux transi au mari désintéressé, on n’assite pas à son changement. On le constate mais ne ressent pas le délitement, ce qui manque cruellement pour saisir l’évolution des émotions, des sentiments et de l’état d’esprit de chacun et par là-même, l’issue fatale qui se dessine (car, si vous ne l’avez toujours pas compris malgré mes appels du pied, à la fin, Maurizio -> couic).
- Stefani Germanotta a le physique du rôle. Certains regretteront le fait qu’elle soit davantage une maladroite et vulgaire potiche plutôt qu’une femme fatale mais c’est justement l’aspect que j’ai apprécié. Patrizia Reggiani est une prolétaire (prolo un jour prolo toujours) et force est de reconnaître que l’actrice l’incarne. Croyez-le ou non, c’est un compliment.
- Jared Leto est i-n-s-u-p-p-o-r-t-a-b-l-e. Son interprétation singée est pathétique et vous serez littéralement gêné pour lui.
- Salma Hayek est insignifiante et Camille Cottin la talonne.
- Al Pacino est décevant.
- Seul Jeremy Irons semble réellement tirer son épingle du jeu, en incarnant à lui seul (ou seulement lui), la prestance attachée à la maison Gucci.
Et au final, on en pense quoi ? La prise de pouvoir manque de perfidie, le glissement insidieux n’est malheureusement pas suffisamment travaillé pour qu’on en jouisse. Jamais on n’écarquille les yeux, jamais on ne s’offusque, jamais on ne manque de s’étouffer. En bref, rien ne vous prendra aux tripes. Alors, ne perdez pas des heures de vie.
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