« Que donne-t-on à une épouse qui a déjà tout ? Une dose d’insuline. »
Voici un avant-goût chatouilleux, tiré de la palette satyrique de Claus von Bülow, interprété par l’excellent Jeremy Irons.
En trois mots ? Tortueux, vénéneux, savoureux. So, let’s have a look !
Sorti en 1990, le Mystère von Bülow est l’adaptation cinématographique de l’ouvrage Reversal of Fortune : Inside the von Bülow case, écrit en 1985 par Alan Dershowitz, lui-même intéressé par l’affaire. Le film relate l’histoire tragiquement vraie de la riche héritière Martha Sharp von Bülow, dite Sunny.
Alors, c’est quoi le pitch ? Sunny [Glenn Close] et Claus [Jeremy Irons] von Bülow font partie d’une strate de la société que vous et moi ne côtoieront probablement jamais. Elle, est une nantie, lui, en est un par mariage. Un jour de décembre 1980, Sunny von Bülow est retrouvée gisant sur le sol de sa salle de bain, plongée dans un profond coma provoqué par une surdose d’insuline. Etrange quand on sait qu’elle n’était pas diabétique, non ? Etrange quand on sait que ce n’était pas son premier malaise du genre, non ? Suffisamment étrange en tout cas, pour qu’un procès ait lieu et déclare son époux coupable de deux tentatives de meurtre. Claus von Bülow sollicite alors le concours de l’avocat et Professeur de droit Alan Dershowitz, pour le représenter lors de son appel (Dershowitz, vous le remettez plus haut ?). Ce dernier est un fervent défenseur des droits civils et bien que le cas von Bülow ne corresponde pas à son terrain de jeu habituel, il accepte de relever le défi (aussi parce que les pépètes de von Bülow lui permettront de financer ses activités pro bono, car oui, le film fait au passage un tacle à la justice à deux vitesses ou plutôt à deux portemonnaies). Dès lors, Dershowitz s’entoure d’une équipe melting-potée composée d’élèves de sa classe pour partir à la chasse aux preuves et très rapidement, des questions se posent…
Amateur de procès, passez votre chemin ! Car ce long-métrage n’est pas un témoin de la mise en œuvre de la machine judiciaire américaine, qu’il n’utilise qu’en toile de fond. Ce film vous propose plutôt d’enfiler le costume de détective aux côtés d’une équipe de juristes tenaces. Vous jouerez avec délectation à l’avocat de al défense et avec encore plus de plaisir à l’avocat du diable. Le Mystère von Bülow offre une narration intelligente qui opère des allers-retours puissamment révélateurs entre le présent et le passé. Le film repose sur deux personnages aux profils diamétralement opposés : Claus von Bülow est un excellent rhéteur, guidé par une équanimité déstabilisante et un humour corrosif si bien utilisé, que l’on se demande plus d’une fois s’il faut rire ou s’abstenir. Sunny von Bülow est quant à elle une femme timide, éteinte, enfermée dans sa dépendance sentimentale et sa torpeur auto-alimentée. Ce long métrage vous conduira à vous immiscer dans la vie de ce couple dissonant, à vous poser des questions dérangeantes et à porter des jugements illégitimes. Meurtre ou suicide, la question demeure ouverte et si vous entendez la trancher avec facilité, armez-vous de courage car le Mystère von Bülow se jouera de vous et le fera jusqu’à la toute dernière scène, qui offre une sortie absolument savoureuse.
Et au final, on en pense quoi ? La force de ce drame réside dans sa narration précurseure pour l’année 1990 et la performance fascinante de Jeremy Irons. Si la disquisition conduite par Dershowitz et son équipe est capable de susciter et maintenir l’intérêt, elle ne m’a cependant pas tenue en haleine. Néanmoins, Jeremy Irons vaut sans conteste et à lui seul le détour [il a d’ailleurs été oscarisé et golden globé du prix du meilleur acteur pour son interprétation]. Au passage, ne vous précipitez pas sur Wikipédia car j’ai déjà fait la curieuse pour vous : Sunny von Bülow aura passé vingt-huit années dans le coma avant de décéder en 2008.
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